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Ma visite au couvent orthodoxe de Sednaya,
le samedi 7 avril 1984
Depuis les premiers jours d'avril, on raconte qu'une chose "étrange" S'est produite au couvent de la Vierge à Sednaya : il s'agit d'une multiplication de l'Eucharistie, sous les deux espèces, dans le même calice, au cours de la messe, le dimanche 11 avril. On raconte même que le prêtre a distribué l'Eucharistie du même calice durant toute la journée, de 9 heures du matin jusqu'à 6 heures du soir. Beaucoup rapportent ce fait. Certains me questionnent à ce propos. Je n'ai rien à dire. Jusqu'au jour où un général d'armée, Abdallah Talli, originaire de Sednaya, me l'affirme à titre de témoin, ainsi que mon ami Georges Chahine. Eux-mêmes se sont précipités à Sednaya et ont communié du calice même.
Je décide d'aller à Sednaya avec mon ami Georges Chahine. Nous y allons le samedi 7 avril, avant midi. Georges est très estimé par la Mère Supérieure. Elle nous accueille au salon. Elle nous certifie ce qu'on raconte sur la multiplication de l'Eucharistie. Mais elle nous assure que le prêtre qui officiait ce jour-là s'est retiré dans sa chambre depuis lors, et qu'il n'a plus adressé la parole à qui que ce soit. Je la prie de lui demander de venir. Il vient. Il s'assied juste en face de moi. Il s'appelle Élias Haddad. C'est un prêtre libanais qui doit avoir la soixantaine. Je le prie, s'il le veut bien, de nous dire ce qui lui est arrivé. Il me regarde longuement en silence, puis il dit :
- Je vais parler ... je vais parler !
Et il nous raconte ce qu'il avait vu : Juste après la fraction de l'Agneau et sa déposition sur la patène, après en avoir placé un quart dans le calice, il voit ce quart grandir au point de remplir toute l'ouverture du calice, et il constate que le calice est rempli jusqu'au bord ; puis, subitement, il voit le Seigneur descendre dans le calice. Arrivé à ce point, je vois son visage s'enfler, ses yeux rougir, et il s'arrête, se tait un moment, puis arrive à articuler :
- Père, je n'en peux plus.
Puis, de nouveau, il relève la tête et me dit après m'avoir regardé longuement :
- Pourquoi, t'ai-je raconté cela ? Tu es la première personne à qui J'en parle.
La Mère Supérieure assure - C'est vrai, je m'étonne qu'il ait parlé.
Puis, nous changeons de conversation, lui demandant de nous parler un peu de sa vie dans sa paroisse à Aley au Liban. Ce qu'il nous raconte et la façon dont il le fait me rappelle ce qu'on lit dans les livres à propos des Pères du désert, au sujet de la simplicité de leur comportement avec le Seigneur.
Nous lui demandons ensuite de nous accompagner au sanctuaire de la Vierge. Je le prie de chanter.
Il improvise une très belle prière et chante d'une voix qui m'éblouit. En sortant, je lui dis :
- Tu vas me permettre d'embrasser les yeux qui ont vu le Seigneur Jésus !
Il se laisse faire en souriant.
Sur le chemin du retour, je regrette de ne pas lui avoir demandé la communion du calice "miraculeux". Nous rebroussons chemin.
Étonné de notre retour, il acquiesce sans difficulté à ma demande, alors que je m'attendais à des réticences, sachant que le patriarche ne permet pas la communion aux non-orthodoxes. A l'église, il me donna la communion, ainsi qu'à Georges, avec la cuiller, selon le rite orthodoxe. Tandis qu'il me communie, j'entends une religieuse derrière moi dire à Georges :
- Oh! Georges, tu aurais dû voir l'huile qui a coulé le jour où Myrna est venue avec le P. Dimitri Maamar. C'était mardi dernier. L'huile coulait des mains de Myrna et des icônes de la Vierge au Sanctuaire.
J'achève mon action de grâces, puis, me tournant vers la religieuse, je lui dis :
- Ma sœur, tu as dit à Georges que l'huile a coulé des mains de Myrna et des icônes de la Vierge. Toi, tu étais là quand cela s'est produit ?
Elle me répond :
- Bien sûr que j'étais là ! Je l'ai vu. Tu aurais dû voir de tes yeux comment l'huile coulait !
Le soir de ce samedi, je vais à Soufanieh pour la prière. Je demande à Myrna un chapelet, si elle en a un. Elle m'apporte une boîte argentée et l'ouvre : un chapelet y est placé dans une enveloppe de velours pourpre. Je préfère le laisser à un autre. Myrna insiste
- C'est ta part !
Je l'accepte et mets la boîte sur le marbre près de la niche de l'Icône. Peu avant la fin de la prière, je me retire : je dois être à l'église pour la répétition de la chorale. Je sors, oubliant la boîte.
Pendant la répétition de la chorale, à l'église, je vois le père de Myrna se tenir devant la sacristie et me faire signe. Il m'apporte la boîte oubliée. Je la prends et veux revenir vers la chorale, quand il me dit :
-Mais, ouvre-la !
Je l'ouvre et je suis surpris de la trouver pleine d'huile odoriférante. Ma joie est sans limites. Je présente la boîte à la chorale, leur racontant ce que le père de Myrna vient de me dire ; quand ils se sont rendus compte que j'avais oublié la boîte, ils l'ont ouverte et l'ont trouvée ruisselante d'huile. Tous les membres de la chorale s'en enduisent le front. Puis, après la répétition, nombre d'entre eux m'accompagnent à Soufanieh, où nous passons un bon moment à chanter une grande partie de l'Acathiste.
Quant à la boîte, je la garderai bien longtemps, puis un beau jour, je l'enverrai, avec le chapelet, au Canada, à mon ami Roger Kahil, à qui j'ai promis un chapelet de "chez la Vierge".