PRÉFACE

Une pédagogie divine

par Antoine Makdisi

Irruption du Surnaturel parmi nous

Ce livre nous présente un ensemble faits dûment constatés, vérifiés et authentifiés par des dizaines, des centaines, et parfois des milliers de personnes, arabes et non arabes, de tous âges, classes sociales, confessions... L'huile, par exemple, qui n'a jamais cessé de suinter, et même de couler à certaines occasions - ordinairement, mais pas nécessairement, pendant la prière - depuis bientôt neuf ans, de l'Icône sainte, de plusieurs de ses reproductions, parsemées un peu partout à Damas et dans le monde, et aussi des mains et du visage de Myrna, de temps en temps, cette huile a été toujours et partout vue, palpée, sentie, goûtée, avalée par certains malades. On a beau faire appel, pour expliquer ce fait miraculeux, à la suggestion, à l'illusion des sens, ou à une névrose collective et d'autres déformations de la perception, le laboratoire, neutre, impartial et sans idée préconçue, est là pour confondre les esprits forts et donner raison au bon sens populaire. En effet, l'huile a été analysée à différentes reprises, dans des laboratoires syriens, français, allemands, italiens... les résultats ont été toujours les mêmes : huile d'olive pure, avec un certain arôme. Les gens du quartier, hommes et femmes du peuple, ne s'y sont pas trompés. A la vue, pour la première fois, de l'huile, ils se sont mis à genoux et ont entamé une prière qui n'a jamais cessé d'attirer des orants des quatre coins du monde.

Soufanieh fait toujours signe vers l'avenir.

Le Seigneur Dieu est "Celui qui vient" toujours, dit l'Apocalypse.

Or, les faits sont têtus. Ils sont là, enregistrés au jour le jour par le P. Élias Zahlaoui, tels qu'ils se sont présentés, comme dans un journal écrit en toute hâte, avec parfois les détails les plus minutieux, sans aucune recherche de style. L'éloquence du récit du P. Zahlaoui est dans la nudité des faits qui s'adressent à nous, nous interpellent, nous parlent. Je dirais même qu'ils nous regardent, nous font signe. Parfois, il me semble qu'ils lancent un défi à ma raison, par nature critique, douteuse, sceptique... mais encore, par nature, sollicitée par la recherche de ce qui est tel que c'est, comme dit Platon, ou la recherche du réel dans sa réalité, si je puis dire. Je n'abdiquerai jamais mon esprit critique, je ne me désisterai jamais de ma faculté de juger, mais il est de l'essence de l'esprit critique de reconnaître les limites de la raison et de la faculté de juger.

Il y a de tout fait une explication scientifique. Notre comportement, même quand nous nous prosternons à genoux devant Dieu et prions, est régi par des lois. Plus généralement, l'homme est tout entier présent dans chacun des actes de sa vie, défauts et vertus compris. Peut-être que la prière est, plus que tout autre acte humain, révélatrice de nos complexes et de nos péchés. Et quand le Seigneur Dieu s'adresse à quelqu'un, Il le prend tel qu'il est, là ou il est. Il le prend, dirais-je, à sa charge, avec ses tares, et ses déformations, pour le transformer totalement et même le transfigurer.

L'homme n'est pas tout entier dans ses conditions d'existence. Il y a en lui un surplus sur sa structure naturelle. Ce surplus est là où l'homme se dépasse, quand il se donne tout entier à une tâche noble ou quand il aime et il est aimé. Ce surplus est l'espace où nous pouvons accueillir le Seigneur. Quand le Seigneur choisit quelqu'un pour en faire son témoin, ou pour le charger d'un message, il ne s'intéresse pas à ses petites déformations ou à nos petits calculs humains, dans l'espace et dans le temps. Quand, dans notre prière, nous disons du Seigneur qu'Il est notre trésor, il nous faut prendre le mot trésor à la lettre. Ce qui veut dire que le Seigneur dote ses élus d'un surplus de grâces qui les amènent à se dépasser eux-mêmes et à dépasser tous les petits calculs des hommes.

Or, à Soufanieh, il y a une présence incontestable du Surnaturel. L'huile en est un exemple. Un autre, la prière, qui est devenue, dès le premier jour, le régime naturel de la maison. Personne ne s'y trompe, même les curieux et les visiteurs neutres ou athées. A Soufanieh, on prie jour et nuit, peut-être la nuit plus que le jour. Un troisième exemple, ce sont les messages qui résument Soufanieh, pour nous et pour les générations futures, et prolongent la Volonté du Seigneur sur nous, pour les siècles des siècles.

Pourquoi Soufanieh, dira-t-on? Pourquoi telle ou telle personne? Je répondrai en citant Siméon qui, quand il a reçu Jésus, le huitième jour de sa naissance, a dit: "Cet enfant doit être un signe en butte à la contradiction" (Luc 2,34).

Il l'est toujours, cet Enfant. Il le sera jusqu'à la fin des temps.

Soufanieh est une œuvre de Jésus, le Christ de Dieu, qui l'a mis sous le patronage de Sa Mère, la Sainte Vierge.

Un retour à la simplicité évangélique

Chose étrange,

Quand l'Icône sainte a été officiellement transportée dans une des églises les plus fréquentées à Damas, aucune goutte d'huile n'a plus paru, durant les quarante-trois jours de son absence. Mais il y avait toujours des reproductions et des orants dans la "maison de la Vierge" à Soufanieh.

Un signe, dirais-je : la Sainte Vierge refuse encore une fois, après plusieurs, d'être institutionnalisée, c'est-à-dire d'être intégrée à un système théologico-social, qui a certes sa foi, sa sainteté, mais aussi ses rites, ses préjugés son système d'idées et de représentations (idéologie) et aussi ses amis et ses adversaires. Dans toutes les apparitions de la Sainte Vierge - Lourdes, Fatima, Rue du Bac... - il y a toujours, me semble-t-il, une sortie en dehors du social et un appel pour le contact direct avec le Seigneur dans la simplicité du coeur. L'institution est absolument nécessaire pour ancrer une communauté chrétienne dans son milieu naturel et humain. Mais elle a aussi ses dangers, qu'on n'a pas pu toujours éviter, hélas : c'est le primat du social, qui devient presqu'une fin en soi, sur le spirituel. Ce danger est d'autant plus imminent que nous traversons une époque de socialisation grandissante et que nous sommes confrontés au gigantisme technologique dégradant pour l'homme. C'est le spirituel qui paie toujours les frais.

Soufanieh n'est pas une église. Les messages sont explicites sur ce point : il n'y a qu'une seule Église, celle que Jésus a fondée et que les hommes ont divisée. Il n'y en aura pas d'autre, dit la Sainte Vierge en substance. Dans le message du 24 mars 1983, il est dit textuellement:

"L'Église qu'a adoptée Jésus est une Église Une, parce que Jésus est Un."

Et la Sainte Vierge ajoute:

"L'Église est le Royaume des Cieux sur la terre. "

Cette dernière phrase est reprise une fois par la Sainte Vierge (le 4 août 1985) et une autre fois par Jésus (le 14 août 1988).

Mais Soufanieh n'est pas en dehors ou en marge de l'Église. Tout ce qui s'y passe, s'y fait, s'y dit - prières, chants, gestes, comportements - est dans l'orthodoxie la plus stricte de l'Église Universelle. Les messages reprennent à leur façon des vérités admises depuis le Concile de Nicée.

Le propre de Soufanieh, la mission qui lui est demandé, me semble-t-il, c'est le retour à la simplicité évangélique originelle, alors qu'on venait à Jésus, directement, spontanément, sans arrière-pensée, et qu'on se jetait à ses genoux. Ce don gratuit de soi à Jésus, ou au prochain - ce qui est la même chose -, c'est le tout du message de Jésus, le tout de l'Évangile, de la Croix et de la spiritualité chrétienne. Peut-être ce don total n'est-il que le fait de saints, mais on nous demande de nous efforcer dans ce sens. Jésus fera le reste.

A Soufanieh, on vient de n'importe ou, chaque groupe, chaque personne, de sa propre initiative. On traverse parfois des centaines de kilomètres pour saluer Marie, la remercier de ses grâces et demander son intercession.

"Priez pour nous, pauvres pécheurs!"

La maison de Marie est toujours ouverte, Myrna toujours à la disposition des orants et des visiteurs. Tout est gratuit dans la maison de la Sainte Vierge. On n'admet aucun présent, des fleurs à la rigueur et pas plus. Dans les grandes commémorations (Jeudi saint et Vendredi saint, veille de Noël, surtout le 26 novembre, veille de l'anniversaire de Soufanieh), la Maison est submergée par les orants, dès 16 heures et même 15 heures. On prie et on attend un signe, en plus de l'huile, ordinairement une extase et un message, parfois des stigmates et une vision. Us guérisons sont inattendues, comme toujours. Dans toutes les réunions, grandes ou petites, la prière est presque toujours improvisée. Quelqu'un commence une prière, les autres suivent, une femme entonne un chant les autres continuent. Un poète populaire improvise un poème chanté, on retient vite le refrain et on le répète. La seule prière presque régulière, et en un sens rituelle, est celle de l'après-midi, chaque jour, de 17 heures à 18 heures 30 environ. Mais ici, les improvisations sont admises et même encouragées. Cette prière de l'après-midi, ou une autre, peut se prolonger avec Myrna, et quelquefois tard dans la nuit.

A Soufanieh, on prie.

Ce retour à l'esprit des premières communautés chrétiennes où les réunions pour la prière s'organisaient spontanément, à n'importe quels moment ou occasion, est devenue absolument indispensable pour l'Église d'Orient, épuisée par l'âge et par les dissensions intrinsèques. N'est-elle pas, parmi les Églises, la première en date et en honneur? Peut-être que l'heure est venue où Jésus voudrait ramener Son Église d'Orient à sa place d'antan.

Ce n'est ni la première, ni la dernière fois, que le Seigneur fait retrouver à Son Église, en Orient et ailleurs, son dynamisme, mis en veilleuse par la socialisation de l'institution. Avec chaque saint, chaque fondateur de communauté de prière, chaque miracle ou manifestation surnaturelle, on assiste à un éveil du sens populaire à la prière. Le social est alors mis entre parenthèses avec ses institutions, règles, préjugés... vidés qu'ils sont de leur âme. Soufanieh manifeste ce retour imprévisible du Seigneur. l'Église n'est pas niée, ni rejetée pour autant, loin de là!

Que veulent dire, en effet, ces paroles proférées par la Vierge, et répétées par Jésus et la Vierge elle-même :

"L'Église est le Royaume des Cieux sur la terre"?

N'est-ce pas que l'Église est là où se rencontrent Ciel et Terre, le Verbe de Dieu et le Social? N'est-ce pas dans le social que le Verbe s'est fait chair pour habiter parmi nous? Les habitués de Soufanieh sont aussi les fidèles, chacun de son Église, où ils participent au Sacrifice divin, non à Soufanieh.

Or, dès le 24 mars 1983, la Sainte Vierge, parlant aux orants de Soufanieh, leur a dit:

"Vous, vous apprendrez aux générations LE mot d'unité, d'amour et de foi."

Et le 26 novembre 1989:

"Vous êtes le cœur dans lequel Jésus bâtira son Unicité."

Paroles exorbitantes, mesurées à ceux à qui elles s'adressent, démunis qu'ils sont de toute autorité sociale, culturelle et même morale, et qui viennent à Soufanieh exposer à leur Mère leurs misères et demander leur pain quotidien. Mais les Apôtres étaient-ils autre chose?

"Donne ce que tu ordonnes", dit saint Augustin dans ses Confessions.

En effet, Jésus leur dit dans Son message du 26 novembre 1988 .

"Ne dites pas : "Qu'est-ce que je fais?"  parce que ceci est Mon oeuvre."

Et Il ajoute :

"Vous devez jeûner et prier, car c'est par la prière que vous ferez face à Ma Réalité, et que vous affrontez tous les coups."

... et une pédagogie divine

Ces paroles

"Ne crains pas.  En toi, je formerai Ma génération",

adressées à Myrna par la Sainte Vierge, le 28 octobre 1983, moins d'un an après la parution de l'huile pour la première fois sur l'icône sainte, répétées dans le message du 4 août 1985, et reprises par Jésus dans Son message du 22 juillet 1987, ces paroles désignent un projet de longue haleine. En effet, une génération ne s'improvise pas, et elle suppose même un programme, dont nous connaissons, par les messages, quelques-uns de ses principaux éléments.

Une nouvelle génération, c'est un nouveau rapport avec Dieu et le prochain, une nouvelle attitude devant le monde, et, en chemin, le chemin du Salut. La prière est sans doute le milieu où se prépare cette génération, les messages son programme. Or, ces messages insistent sur trois thèmes qui se répètent, tels les leitmotive d'une symphonie.

D'abord, la prière : Priez, priez, priez, est-il répété d'une façon ou d'une autre dans tous les messages. Or, dans la prière, on se reconnaît pécheur, donc on se dépouille de soi et l'on s'abandonne à la miséricorde de Dieu.

Que Ta Volonté soit faite!

Puis, l'Église. Dans le message du 24 mars 1983, la Sainte Vierge insiste sur l'Unité de l'Église, et dit textuellement:

"L'Église est le Royaume des Cieux sur la terre. Qui l'a divisée a péché, et qui s'est réjoui de sa division a péché."

La Vierge ajoute après quelques phrases :

"Ne vous divisez pas comme le sont les grands... Vous, vous apprendrez aux générations LE mot d'unité, d'amour et de foi."

Ce même message est repris par la Sainte Vierge et par Jésus.

Deux choses sont à souligner à propos d'Église :

D'un côté, l'urgence de l'Unité, qui est d'abord l'unité des cœurs, comme on vient de le voir. Dans les trois messages de 1990, Jésus et Marie déclarent qu'ils vont disparaître jusqu'à ce que l'unité de la Fête (Pâques) soit réalisée.

D'un autre coté, il n'y a dans tous les messages aucune condamnation d'aucune sorte, même pour ceux qui ont divise l'Église. Soufanieh est un espace de Pardon, de Réconciliation et d'Amour universel. Seuls sont exclus les Judas :

"Malheur à celui qui représente Mon image, alors qu'il a vendu Mon sang",

affirme énergiquement Jésus.

Le troisième thème, complémentaire des deux précédents, c'est la Paix du Seigneur: la Paix face à la corruption devenue la règle.

"Va à la terre où la corruption s'est généralisée et sois dans la paix de Dieu",

dit Jésus à Myrna le 26 novembre 1985. Et Il ajoute dans Son message du 26 novembre 1987

"Ma Paix dans ton cœur sera une bénédiction pour toi et pour tous ceux qui ont collaboré avec toi."

Cette Paix-bénédiction est par-delà tout ce qui divise les hommes.

Dans le message du 15 août 1990, donné en Belgique, la Sainte Vierge nous dit :

"Priez pour la paix, et surtout en Orient. "

La conjoncture est assez connue. La Vierge ajoute immédiatement cette phrase qui fait beaucoup méditer:

"Car vous êtes tous frères dans le Christ"

Soufanieh n'est ni une église, ni en dehors de l'Église, ai-je dit. Elle est, dirais-je encore, un centre de formation fondé par le Verbe de Dieu lui-même et qui a chargé Sa Mère Sainte de le patronner. La nouvelle génération s'y forme, et d'ores et déjà un nouveau levain, qui doit faire lever la pâte, depuis longtemps immobile, dans la vieille Église d'Orient. Pour que cette Église puisse reprendre un jour son véritable rôle, qui est d'être la matrice ou se forment les autres Églises.

Dès son premier message (18 décembre 1982), vingt jours après la parution de l'huile sur l'Icône sainte, la Sainte Vierge met les orants et les amis de Soufanieh devant leurs responsabilités :

"Repentez-vous et ayez foi.  Faites le bien à ceux qui font le mal. Annoncez Mon Fils L’Emmanuel."

Ce qui veut dire que Dieu est toujours avec nous.

Mais le grand souci de la Sainte Vierge, et qui sera celui de Son Fils Jésus, c'est la division de l'Église, dont les nuisances sont les plus sensibles en Orient, où les petites Églises sont presque paralysées par leurs luttes sourdes. Dès Sa troisième apparition (le 8 janvier 1983), la Sainte Vierge n'a fait que pleurer, et dans son message du 1er mai 1985, elle dit:

"Ne laissez pas Mon cœur se diviser à cause de vos divisions. "

et dans celui du 14 août 1985, la Sainte Vierge répète

"Votre prière est Ma fête, votre foi est Ma fête, l’union de vos cœurs est Ma fête. "

Une lecture de tous les messages de Soufanieh à partir du thème de l'Unité de l'Église serait, à cet égard, très édifiante. Or, l'Unité n'est pas le fait d'un accord entre les théologiens, ni d'un rapprochement entre les institutions, ni même d'un acquiescement dans toutes les Églises à la dogmatique de l'une d'entre elles. Le Christ-Jésus passe outre toutes ces tentatives humaines de rapprochement, pour s'adresser directement au cœur des hommes de bonne volonté, et les convertir à Lui, ou pour les ramener, à travers Sa médiation, au Père céleste. Ne dit-Il pas dans Son message du 26 novembre 1988:

"Tout ce que Je veux, c'est que vous vous rassembliez tous en Moi, comme Je suis en chacun de vous."

Et dans le message du 26 novembre 1989:

"Vous êtes le cœur dans lequel Jésus bâtira Son Unicité. "

Ce nouveau levain que Jésus forme n'est pas le fait d'un ancien quartier de Damas. Soufanieh se multiplie rapidement un peu partout dans le monde. Il y a et il y aura d'autres apparitions de la Sainte Vierge, de Jésus le Christ, et d'autres saints. N'avons-nous pas Medjugorje et Kibého? Jésus affirme dans ces apparitions Sa royauté face à un monde soumis au diktat de la bombe atomique. Mais cette royauté est dans l'humilité du Cœur de Marie qui a sauvé le monde et le sauvera par Sa prière. Jésus révèle la vérité de Sa Mère quand Il dit dans son message du 7 septembre 1985 :

"Réjouissez-vous de la joie du Ciel,
car La fille du Père et La Mère de Dieu et L'Épouse de L'Esprit  est née.
Exultez de l'exultation de la terre, car votre salut est réalisé."

Et je me demande :

Les débuts de Soufanieh ne nous rappellent-ils pas un autre début, celui-là beaucoup plus modeste? Peut-être, car quand les portes du Ciel s'ouvrent, que ce soit à Lourdes, à Assise, à Soufanieh ou ailleurs, c'est pour un retour à la Source qui est Bethléem jusqu'à la fin des temps, retour à la simplicité de coeur qui rend les gens disponibles pour l'écoute du message divin. Soufanieh n'est pas qu'un quartier de Damas. Il est, après neuf ans de sa vie, disséminé dans le monde, et il le sera de plus en plus.

Il est incontestable que, par sa neutralité humaine, la civilisation dite scientifico-technique, qui régit de nos jours et pour longtemps le monde entier, met l'homme, en dépit du confort qu'elle lui procure, dans une situation spirituelle pire que celle où il était dans le pire des paganismes. Peut-on dire que les signes qui se multiplient de nos jours, dans plusieurs régions du monde, dénotent chez le Seigneur le désir d'humaniser et de spiritualiser cette civilisation? Tout nous porte à le croire, particulièrement l'insistance des messages de Soufanieh sur la prière, la paix du cœur, l'unité en Jésus-Christ. Tout nous porte à croire que les temps sont proches pour que les enfants prodigues rentrent au bercail, pour retrouver la Paix du Seigneur face à l'angoisse du monde. Que Sa Volonté soit faite sur la terre comme au ciel!

Jésus qui, à partir du 31 mai 1984, reprend les principaux thèmes formulés par Sa Mère Sainte, les approfondit et leur ajoute d'autres, et par le fait même nous trace à nous, amis et orants de Soufanieh, la voie à suivre pour que cette Volonté soit faite, surtout dans l'Unité de l'Église qui sera alors le Royaume du Ciel sur la terre.

Jésus commence par révéler ce qu'Il est :

"Je suis le Commencement et la Fin.  Je suis la Vérité, la Liberté et la Paix.  Je vous donne Ma paix" (31 mai 1984).
"Je suis le Créateur" (7 septembre 1985).

Mais il y a un préalable, plus exactement un choix préalable que Jésus, s'adressant à Myrna, nous demande de faire, nous tous qui prétendons être Ses fidèles. Il est hautement significatif qu'exactement trois ans après la parution de l'huile sur l'Icône sainte (26 novembre 1985) - période de préparation, dirais-je -Jésus dit à Myrna ceci en substance :

"Moi ou le Monde.
Le chemin de la Croix ou le chemin du monde"

L'interrogation est posée près de deux années durant, du 26 novembre 1985 jusqu'au 26 avril 1987. Près de deux années durant, Jésus met à l'épreuve la volonté de Myrna, sa persévérance. Mais Il ne la délaisse pas pour autant. Il est toujours en dialogue avec elle. Il n'est pas moins significatif que, durant cette période, c'est Jésus seul qui parle. Ses messages sont parmi les plus riches qui aient été jamais communiqués à un humain. A chacun de les méditer dans son cœur. Myrna est ici chacun de nous. Nous, hommes de toutes les nations, races, religions, confessions... Jésus ne sera satisfait des réponses de Myrna, que lorsqu'Il remarquera qu'elle est presque disponible - on ne l'est jamais tout à fait -pour traverser jusqu'au bout son chemin de la Croix.

Il me semble opportun de souligner ici deux passages de ces messages. Le premier est du 26 novembre 1986 :

"Je veux renouveler Ma Passion et Je veux que tu accomplisses ta mission."

Le deuxième est du 18 avril 1987, veille de Pâques:

"Je vous ai donné un signe pour Ma glorification. Poursuivez votre route et Je suis avec vous. Sinon ... "

Menace, a-t-on dit. Peut-être. Mais quand on a à faire un choix, on doit peser le pour et le contre. Jésus ne mâche pas ses mots, dans une circonstance décisive pour Soufanieh.

"Moi ou le monde."

La voie que Jésus trace à Myrna - et à nous qui prétendons être ses amis - me rappelle deux versets de l'Évangile.
Le premier:

"Entrez par la porte étroite" (Mt 7,13).

Le second :

"Qui aime son père ou sa mère plus que Moi, n'est pas digne de Moi. Qui aime son fils ou sa fille plus que Moi, n'est pas digne de Moi" (Mt 10,37).

En effet, après avoir mis Myrna, pour la première fois, devant le choix décisif (message du 26 novembre 1985), Jésus ajoute :

"Car toutes les fois que tu regardes les créatures, le regard du Créateur s'éloigne de toi.
Je veux que tu t'appliques à la prière et que tu te méprises.
Car celui qui se méprise augmente en force et en élevation de la part de Dieu."

Puis, s'adressant à nous, Jésus dit :

"Car celui qui s'associe avec Moi à la souffrance, Je le ferai participer à la gloire.
Et il n'est de salut que par la Croix."

Jésus demande ici à chacun de ses amis de se désister de soi et de se délester complètement du monde - auquel il est pourtant acculé par la structure de sa conscience - pour être à Lui seul. C'est un changement radical du regard, diraient les philosophes, plutôt une conversion du cœur, dit l'homme de foi.

Jésus ajoute, s'adressant à Myrna (26 novembre 1987) :

"Ne déteste personne pour que ton cœur ne s'aveugle pas sur ton amour pour Moi."

Véritable ascèse qui demande un long travail sur soi, où les chutes et rechutes ne manqueront pas. Mais est-il possible, surtout pour une jeune femme - ou un jeune homme, bien entendu -, de se maintenir longtemps sur cette arête aride où l'on pourrait périr de faim et de soif? Mais l'essentiel est de vouloir, de faire le premier pas. Jésus fera le reste. Ne dit-Il pas trois fois à Myrna qui est toujours chacun de nous : "Je te donnerai de Mes blessures pour oublier les souffrances que les gens te causent." (10 octobre 1988).

Et aussi dans le message du 26 novembre 1985...

L'on n'est pas isolé du monde pour autant. Jésus ne dit-Il pas à Ses disciples dans l'Évangile de saint Jean :

"Je ne vous sors pas du monde"?

Le monde est d'ores et déjà rendu à nous, mais totalement transformé, même transfiguré pour devenir le monde du prochain, c'est-à-dire le monde où chaque personne humaine que nous rencontrons incame Jésus, le Christ de Dieu. La Sainte Vierge ne dit-elle pas à Myrna (25 novembre 1983) :

"Je ne suis pas venue pour séparer. Ta vie conjugale restera comme elle est."

Et encore, le 7 septembre 1984:

"Vis ta vie. Cependant, que la vie ne t'empêche pas de continuer à prier."

Jésus est plus explicite (26 novembre 1987) : "Persévère dans ta vie d'épouse, de mère et de sœur."

Telle est la pédagogie divine un long chemin de la Croix, soutenu par la Croix de Jésus qui a traversé le Cœur de Marie etoù règne d'ores et déjà la charité universelle du Christ Jésus.

Conclusion : Prêcher.

"Malheur à moi si je ne prêche pas", disait saint Paul. La prédication est une dimension de l'existence chrétienne, telle la Croix ou la Paix du Seigneur. L'on était encore à la troisième semaine de Soufanieh (18 décembre 1982) quand la Sainte Vierge nous l'a rappelé :

"Prêchez Mon Fils L’Emmanuel",

a-t-elle dit, ce qui veut dire : faites connaître à tous que Dieu est avec nous, et aussi avec toute personne humaine qui le voudrait. Dans la plupart des messages, Jésus et Marie ne cessent de répéter d'une façon ou d'une autre, à Myrna d'abord, puis aux amis et orants de Soufanieh, ces trois vérités complémentaires:

"N'ayez pas peur : Je suis avec vous! Prêchez! Soyez dans la Paix du Seigneur et dans Sa Bénédiction!"

A entendre ces paroles, les questions vont proliférer dans notre esprit, hommes de la fin du 20e siècle.

A qui adresser la parole? Comment? De quelle manière? Est-ce le moment?

Le comble du paradoxe apparaît quand on entend Jésus dire à Myrna, cette femme douce et timide, et qui se trouve complètement démunie quand elle commence à parler:

"Et que ta langue soit un glaive qui parle en Mon Nom" (26 novembre 1988).

Mais saint Pierre, le Chef de l'Église, était-il beaucoup plus éloquent que Myrna? Chez Jésus, il n'y a pas de paradoxe. Jésus dit toujours ce qui est. En effet, Myrna a déjà semé Soufanieh dans plusieurs villes et villages du monde. Et l'on est encore au début de ses peines, comme dit Jésus à Myrna (7 septembre 1988). Notre attitude vis-à-vis de l'autre, notre silence comme notre parole, un regard, un geste, un mot jeté par hasard... tout peut devenir prédication si nous acceptons que Jésus y soit présent. D'ailleurs, Jésus a d'ores et déjà répondu à nos interrogations :

"Ne dites pas : 'Qu'est-ce que je fais?' parce que ceci est Mon oeuvre." (26 novembre 1988).

Ce qui veut dire : faites-vous une âme chrétienne et moi, je ferai le reste. Jésus n'avait-il pas dit à Myrna dans un précédent message (10 octobre 1988):

"Ma fille Marie, pourquoi crains-tu alors que Je suis avec toi?  Tu dois dire et d'une voix haute la Parole de vérité sur Celui qui t'a créée, pour que Ma Force se manifeste en toi."

La prédication est en effet un témoignage rendu à la Vérité que ni la chair ni le sang ne proclament, mais celui qui est la Vérité, le Père céleste, comme dit Jésus à Pierre.

Les trois messages de 1990 terminent, me semble-t-il, une étape de la vie de Soufanieh sur une note triste, mais en même temps énergique et prophétique.

"Tu n'entendras plus Ma Voix.
Tu ne Me verras plus que lorsque l'Unité de la Fête (Pâques) sera réalisée".

disent Jésus et Marie aux orants de Soufanieh et à Myrna.

Marie communique à Myrna, en visite missionnaire dans un village de Belgique (15 août 1990), ces paroles qui laissent entendre beaucoup plus qu'elles n'expriment:

"Mes enfants, priez pour la paix, surtout en Orient, parce que vous êtes tous frères dans le Christ."

Jésus s'adressant aux orants, dans Son message du 14 avril 1990, répète pour la troisième fois cette expression :

"Vous, vous apprendrez aux générations LE mot d'unité, d'amour et de foi."

Et la Vierge à Myrna (26 novembre 1990):

"Viens pour qu'Il te donne la paix, afin que tu puisses la répandre parmi les hommes."

Les messages ne sont pas le tout de Soufanieh. Mais ils constituent l'espace ou ce qui s'accomplit à Soufanieh passe à la lumière de la parole. Alors, l'huile, les extases, les stigmates et les miracles proprement dits, sont les signes qui confirment pour notre entendement, toujours incrédule, l'authenticité de la Parole ou de la Volonté de Dieu sur nous. Il reste que la Parole est toujours l'instrument privilégié de notre formation. Et la prière, dira-t-on? Elle est, par ses formes multiples, une des formes multiples de la Parole. Or, les Paroles proférées à Soufanieh constituent, dans leur simplicité évangélique, l'essentiel du message divin adressé aux hommes de tous les temps.

En bref, messages, signes et prière collaborent ensemble à la même œuvre : la formation d'une nouvelle génération. Myrna, principale interlocutrice de Jésus et de Sa Mère, n'est pas pour autant un modèle achevé. Mais elle nous montre un exemple vivant de la transformation qu'opère le Saint-Esprit dans une personne, quand elle répond, même timidement, à Son Appel.

Soufanieh est beaucoup plus que Myrna et que tous les orants et amis qui répondent actuellement à l'appel de l'Esprit Saint. Nous sommes, en dépit de neuf ans d'enseignements, au début de la vie spirituelle qui se dessine à Soufanieh, véritable tournant dans la vie chrétienne du monde arabe et ailleurs, tournant qui nous cache encore beaucoup de surprises.

"La moisson est abondante, mais les ouvriers peu nombreux. Priez donc le Maître de la moisson d'envoyer des ouvriers à la moisson."

Antoine MAKDISI

Damas, le 6 août 1991.